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Ann. Phys.
Volume 3, 1978
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Page(s) | 5 - 114 | |
DOI | https://doi.org/10.1051/anphys/197803030005 | |
Published online | 26 April 2017 |
Deep inelastic reactions with heavy ions. A probe for nuclear macrophysics studies
Interactions profondes entre ions lourds. Moyens d’étude de macrophysique nucléaire
Laboratoire de Chimie Nucléaire, Institut de Physique Nucléaire, B. P. n° 1 — F 91406 Orsay, France.
The purpose of this survey is to describe a new frontier in nuclear physics and to present prospects of this topic. Beams are now available for heavy ions from Li to Uranium, and they present themselves as a wide range of probes for studying nuclear matter.
In the first chapter the main aspects of these probes as well as the general trends of the phenomena are sketched : deflection function, nucleus-nucleus potential, emphasize on collective aspects.
Chapter II deals with complete fusion between two complex nuclei, which is considered as the extreme limit of inelastic collision. An analysis is made of the criteria for the existence of a compound nucleus, a well-defined system in which nucleons are in statistical equilibrium. The various limitations to complete fusion are indicated and briefly discussed: angular momentum, repulsive part of the potential due to nuclear matter incompressibility, shape deformation... The de-excitation of this compound nucleus which is highly excited and often shares large angular momenta, proceeds through particle emission, gamma radiation and eventually fission. After describing these decay-modes, a general picture is given of the various aspects of nuclear matter in different shapes and at different temperatures.
Chapters III and IV deal of the discovery of a new class of reactions between complex nuclei, the so-called « Deep Inelastic Reactions » which take a great importance. The general description is given in chapter III and the theoretical analysis in chapter IV. They correspond to collisions which do not end up complete fusion, although a very strong change occurs in both partners, and a large kinetic energy dissipation. The nuclear exchange during the interaction might be either small or big, but there is a memory of the projectile and of the target concerning the mass asymmetry.
The main feature of these phenomena is now rather well described. After a « deep » or a « hard » contact an intermediate species is formed, made of two nuclei connected by a neck. This short life system begins to rotate under the effect of the orbital angular momentum. The kinetic energy from the entrance channel is dissipated into individual and collective excitations. Then, the rupture into two fragments occurs from a very deformed object, at a time which depends strongly on the charge asymmetry, on the energy and on the angular momentum. The kinetic energy in the exit channel is attributed to Coulomb repulsion plus centrifugal effects after disruption. The statistical equilibrium has not been reached in the « composite » system, but nucleons of both partners have interacted in a potential well very different of the potentials of separated nuclei. Many level-crossings have occurred. The various conceptual ideas of non-equilibrium statistical mechanics, the treatment of transport phenomena and of fluid dynamics have been obviously introduced. This kind of theoretical approach is quite new in nuclear physics where single particle models issued from the atomic orbital quantal description, have been so successful. This novel description of the « nuclear fluid » consists in a « macrophysics approach » and is complementary of the « microscopic description ». This is obviously because we deal with different probes so the heavy ion accelerators bring another set of tools for exploring atomic nuclei.
Résumé
Ce texte a pour objet de décrire le développement récent et de dégager quelques perspectives d’un secteur très vivant de la physique du noyau atomique. Les ions lourds constituent des sondes très diversifiées permettant l’étude de la matière nucléaire, et les faisceaux maintenant disponibles vont du lithium à l’uranium.
Dans une introduction, sont indiquées les particularités de ces sondes et sont évoqués les aspects principaux des phénomènes explorés : fonctions de déflexion, potentiels noyau-noyau, importance des aspects collectifs.
Le chapitre II étudie la fusion complète de deux noyaux, considérée comme le résultat d’une collision la plus inélastique possible. On analyse les conditions pour qu’elle ait lieu, les critères définissant le noyau composé, système en équilibre statistique de tous les nucléons constituants. Les phénomènes qui limitent cette fusion complète (moment angulaire, potentiel répulsif dû à l’incompressibilité de la matière nucléaire, déformation, etc.) sont décrits et analysés. La désexcitation de ce noyau composé fortement excité et disposant souvent d’un grand moment angulaire conduit à l’émission de particules (p, n, α) de rayonnements γ et à la fission. Ces divers modes sont décrits, ainsi que les aspects révélés par les observations expérimentales sur les propriétés de cette matière nucléaire placée dans des conditions particulières de forme et de température.
Les chapitres III et IV traitent de la découverte d’une nouvelle classe de réaction entre noyaux, dont l’importance est souvent prépondérante et que l’on appelle souvent « réactions profondément inélastiques ». Elle est décrite avec quelques détails dans le chapitre III et analysée théoriquement au chapitre IV. Il s’agit de collisions non suivies de fusion complète mais, cependant, accompagnées de très forts bouleversements des deux partenaires, avec dissipation plus ou moins grande de l’énergie cinétique du mouvement. L’échange de nucléons au cours de cette interaction peut être soit faible, soit important, mais il subsiste un souvenir du projectile et de la cible en ce qui concerne l’asymétrie de masse.
On sait maintenant décrire les grandes lignes de ces phénomènes. Après un contact profond, un ensemble intermédiaire est formé, constitué de deux noyaux réunis par un col. Cet ensemble de courte vie amorce une rotation sous l’influence du moment angulaire orbital initial. L’énergie cinétique de la voie d’entrée est dissipée en excitations collectives et individuelles, Puis la séparation a lieu à partir d’un objet très déformé et à un instant au cours de la rotation qui dépend beaucoup de l’asymétrie de charges, de l’énergie et du moment angulaire lui-même. L’énergie dans la voie de sortie est attribuée à la répulsion coulombienne après rupture et à la rotation. Il n’y a pas eu équilibre statistique dans le système « composite », mais les nucléons des deux noyaux incidents ont eu l’occasion d’interagir dans un potentiel très différent des potentiels des deux noyaux séparés et des croisements de niveau très nombreux ont eu lieu. Les concepts de mécanique statistique hors d’équilibre, de traitement des phénomènes de transport, et aussi de dynamique des fluides visqueux ont donc été tout naturellement introduits. Il s’agit d’une révolution en physique nucléaire, où les modèles à particules indépendantes fortement influencés par la description quantique des orbitales atomiques ont obtenu un grand succès. La nouvelle description du « fluide » nucléaire de type « macrophysique » est complémentaire de la description précédente « microscopique ». Les outils d’exploration sont évidemment différents et les accélérateurs à ions lourds viennent compléter la panoplie des instruments nécessaires à l’exploration des noyaux atomiques.
© Masson et Cie, Paris, 1978