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Ann. Phys.
Volume 14, Number 8, 1973-1974
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Page(s) | 403 - 441 | |
DOI | https://doi.org/10.1051/anphys/197314080403 | |
Published online | 25 April 2017 |
Étude expérimentale de la réponse non linéaire d’atomes de néon soumis à une irradiation laser résonnante(1)
Experimental study of the nonlinear response of neon atoms to a resonant laser irradiation
Laboratoire de Spectroscopie Hertzienne, Ecole Normale Supérieure, 24, Rue Lhomond — F 75231 - Paris Cedex 05, France.
L’analyse de la lumière de fluorescence émise par des atomes pompés optiquement par un faisceau laser polarisé permet un grand nombre d’expériences. Pour une grande partie de ces expériences (effet Hanle, résonance magnétique, croisement de niveaux), le laser est simplement utilisé comme une source lumineuse particulièrement bien adaptée au pompage optique des niveaux excités. Ce premier ensemble d’expériences peut être interprété dans le cadre de la réponse linéaire du milieu atomique à l’irradiation laser. Cependant, à cause des fortes intensités d’irradiation mises en jeu, il apparaît aussi des effets non linéaires par rapport à l’intensité laser. Cette réponse non linéaire peut apparaître de deux façons :
- 1)
en tant que perturbation de la réponse linéaire (par exemple, élargissement radiatif de l’effet Hanle, déplacement radiatif de la résonance magnétique) ;
- 2)
Par ailleurs, il existe des effets purement non linéaires (résonance de saturation sur les populations des niveaux, création de moments multipolaires d’ordre élevé).
L’objet de cet article est de présenter une revue complète des effets non linéaires observés en champ magnétique faible, sur le néon pompé par un faisceau laser de polarisation rectiligne σ. Cette étude expérimentale est interprétée au moyen d’une analyse théorique non perturbative de la réponse du milieu atomique. Cette théorie, valable pour des intensités laser arbitraires, introduit une probabilité de transitions induites par le laser, γ. Les caractéristiques de la réponse non linéaire dépendent des moments cinétiques des deux niveaux de la transition laser.
- a)
Pour les transitions 2s2-2p1 (λ = 1.52 µ) et 2s2-2p1 (λ = 7 305 Å) du néon (transitions J = 1—J = 0), l’effet Hanle a toujours une forme de Lorentz. L’élargissement radiatif de l’’effet Hanle permet de déterminer le taux de pompage, γ. Par ailleurs, la largeur extrapolée à l’intensité laser nulle donne le temps de relaxation de l’alignement des niveaux 2s2 et 3s2. Cependant, cette extrapolation s’avère difficile car d’une part, l’élargissement radiatif ne varie pas linéairement avec γ, d'autre part, γ n’est pas toujours proportionnel à l’intensité laser. Nous montrons en particulier que des erreurs d’extrapolation sont à l’origine d’une détermination antérieure erronnée de la durée de vie du niveau 3s2. La population du niveau 2p1 (J = 0) présente une résonance de saturation, ayant la même forme que l’effet Hanle et dont l’amplitude permet de déterminer le temps de relaxation de ce niveau. Enfin, nous montrons l’importance de l’effet de la diffusion multiple des raies de résonance sur la réponse non linéaire du milieu atomique.
- b)
Les prédictions théoriques pour une transition J = 1 — J = 1 ont été vérifiées sur la transition 3s2-2p2 (λ = 6 401 Å) : forme lorentzienne des effets Hanle — similitude de leurs élargissements radiatifs — forme de raie de la résonance de saturation. Les conditions de la création — en plus du dipôle optique de la transition — d’un moment quadrupolaire optique, pour de fortes intensités d’irradiation, sont analysées à la lumière des résultats expérimentaux.
- c)
L’étude d’une transition J = 1 — J = 2, qui fournit les traits les plus originaux du pompage laser, a été réalisée avec les raies λ = 6 328 Å (3s2-2p4) et λ = 1,15 µ (2s2-2p4). Dans le cas d’une irradiation à 6 328 Å, nous avons pu mettre en évidence la création dans le niveau 2p4 d’un moment hexadécapolaire (cohérence entre les sous-niveaux Zeeman m = ± 2) à partir de la forme de raie de l’effet Hanle du niveau 3s2. Nous discutons à ce propos de la possibilité de mesurer le temps de relaxation hexadécapolaire du niveau 2p4 à partir du taux d’anisotropie de la fluorescence du niveau 3s2. Par ailleurs, pour des irradiations laser à 6 328 Å ou 1,15 µ, nous avons observé sur la fluorescence à 5 944 Å (2p4 → 1s5) le renversement de la résonance de saturation à forte intensité laser. Il a été possible de mettre en évidence que, comme prédit par la théorie, ce renversement est accentué lorsque la durée de vie du niveau J = 1 (ici 3s2 ou 2s2) est plus longue, car cet effet est essentiellement lié au temps de passage de l’atome dans ce niveau.
Abstract
The study of the fluorescence light emitted by excited atoms optically pumped by a polarized laser beam provides a wide range of experiments. For many of them (Hanle effect, magnetic resonance, level crossing), the laser is used only as a convenient light source for the optical pumping of excited levels. This first set of experiments may be interpreted by means of the linear response of atoms to the laser irradiation. However, the high intensities involved in laser pumping experiments are responsible for the appearance of non-linear effects. This non-linear response appears in two ways:
- i)
As a perturbation of the linear response (e. g. radiative broadening of the Hanle effect, light-shift of the magnetic resonance);
- ii)
In addition, there are pure non-linear effects (saturation resonance on the level populations, creation of higher-order multipole moments).
The purpose of this article is to present an exhaustive review of the non-linear effects induced on neon atoms in weak magnetic fields by a linearly σ-polarized laser beam. This experimental study is interpreted with the help of a non-perturbative theoretical approach of the laser pumping. This theory is valid for arbitrary laser intensities and involves a laser pumping rate, γ. The features of the non-linear response depend on the angular momenta of the atomic levels.
- a)
For the 2s2-2p1 (λ = 1.52 µ) and 3s2-2p1 (λ = 7 305 Å) neon transitions (J = 1 — J = 0 transitions), the Hanle effect always has a lorentzian shape. The power-broadening of the Hanle effect allows us to determine the pumping rate, γ. On the other hand, the zero-laser-intensity extrapolated width gives the relaxation rate of the 3s2 and 2s2 alignments. However this extrapolation is difficult because on the one hand, the radiative broadening is a non-linear function of γ and, on the other hand, γ is not always proportional to the laser intensity. In particular, we show that a wrong extrapolation is at the origin of an erroneous previous determination of the 3s2 lifetime. The population of the 2p1 level (J = 0) exhibits a zero-field saturation resonance similar to the Hanle effect. The amplitude of this resonance allows us to determine the 2p1 relaxation time. We also analyse the influence of the resonance line trapping on the non-linear response of the medium.
- b)
The theoretical predictions for a J = 1 — J = 1 transition have been experimentally checked with the 3s2-2p2 transition (λ = 6 401 Å): lorentzian shape of the Hanle effects — similitude of their radiative broadenings — lineshape of the saturation resonance. The conditions of the creation of an optical quadrupole moment — in addition to the optical dipole of the transition — for high laser intensities are analysed using the experimental results.
- c)
The study of a J = 1 — J = 2 transition, which provides the more original features of the laser pumping, has been performed with the 6 328 Å (3s2-2p4) and 1.15 µ (2s2-2p4) laser lines. For a 6 328 Å irradiation, the lineshape of the 3s2 Hanle effect shows experimental evidence for the generation, in the 2p4 level (J = 2), of an electric hexadecapole moment (i. e. coherence between m = ± 2 Zeeman sublevels). The possibility of measuring the 2p4 hexadecapole relaxation rate by means of the anisotropy ratio of the 3s2 fluorescence is analysed in a detailed way. For 6 328 Å and 1.15 µ laser irradiations, the 5 944 Å (2p4 → 1s5) fluorescence line exhibits a reversal of the saturation resonance for high laser intensities. As is predicted by the theory, this reversal grows when the lifetime of the J = 1 level (3s2 or 2s2) increases, because this effect is connected to the transit time of the atom in this level.
Cet article expose l’ensemble des résultats expérimentaux contenus dans la Thèse de Doctorat d’État de l’auteur soutenue par l’auteur le 19 décembre 1973 devant le jury composé de MM. Brossel (Président), Jacquinot, Cohen-Tannoudji, Toschek, Decomps et Dumont (Examinateurs). (Numéro d’enregistrement au C. N. R. S. : Ao. 9.381).
© Masson et Cie, Paris, 1973